Adam Smith (1723-1790), père du libéralisme et apôtre de la concurrence, enseignait que l’État devait laisser libre cours à « la main invisible du marché ». Mais il ne préconisait pas l’effacement de l’État, loin de là. Celui-ci devait organiser le marché afin de garantir son bon fonctionnement. Pour cela, il avait l’obligation de remplir trois devoirs, détaillés dans l’ouvrage Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations [Smith, 1776]. Le premier était de disposer des moyens militaires pour assurer la sécurité du pays. Le second, d’établir une justice permettant à chacun de disposer de son libre arbitre. Le troisième, « d’élever ou d’entretenir ces ouvrages et établissements publics dont une grande société retire d’immenses avantages et qui ne sauraient être entrepris par des particuliers » du fait d’investissements à trop long terme. À l’époque, il s’agissait des ports, des routes, des ponts et des canaux. Ils furent appelés « biens publics ». Pour le père fondateur de l’économie de marché, ces « biens publics » dispensateurs « d’immenses avantages », en fait indispensables au fonctionnement de la société, devaient rester du ressort de l’État donc hors marché. Adam Smith précisa que ces biens publics évolueraient avec l’avancement de la société. Ils sont les ancêtres des services publics à la française et des services d’intérêt économique général (SIEG) prévus par les traités européens. La notion s’est transformée, comme le rôle dévolu à l’État dans le domaine économique.

Comme représentant d’EDF et président du groupe de travail « marché de l’électricité » d’Eurelectric (1989-2000) et du comité consultatif de l’énergie européen (1998-2001), Lionel Taccoen a participé au débat instaurant la concurrence en électricité. Professeur des universités associé, titulaire de la chaire des affaires européennes de l’Université de Technologie de Troyes, il a enseigné l’histoire des idées économiques (1998- 2004). Il est directeur de la lettre « Géopolitique de l’Électricité ».

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